« Les traductions se démodent vite, et il arrive parfois que le style même vieillit et meurt. Mais les Écritures restent toujours jeunes, toujours fraîches, comme un éternel défi à l’art de la traduction » (Julien Green).
Les lecteurs francophones ont de la chance, mais ils sont en droit d’être perplexes : ils disposent de plus de vingt traductions de la Bible, officielles ou marginales, juives, catholiques, protestantes ou interconfessionnelles. Depuis l’an 2000, on a réédité une traduction historique (celle de Castellion, 1555 !) et sont parues deux nouveautés : La Bible, nouvelle traduction (Bayard, 2001), La Nouvelle Bible Segond (2002) et deux révisions : la Bible Segond 21 (2007), la TOB (2010). De plus, deux éditions ont pris pour base la Bible en français courant afin d’offrir une présentation annotée pour des adultes (La Bible expliquée, 2004) et pour des jeunes (Ze Bible, 2011). Dans le cadre d’une révision des livres liturgiques, les catholiques attendent, dans les mois qui viennent, une version intégrale de la Traduction liturgique de la Bible. Enfin, l’École biblique et archéologique française de Jérusalem a engagé un projet que l’on peut suivre sur le web : « La Bible en ses Traditions » (voir www.bibest.org).
Dans les librairies, on ne compte plus les éditions de poche – du Nouveau Testament surtout, sans parler de tel ou tel livre, détaché de l’ensemble et offert ainsi à la curiosité du lecteur. Une étonnante aventure a produit L’Évangile de Luc en langue des signes (2010 [Voir CE n° 154 (décembre 2010), p. 71-72]).
Nous n’envisagerons, dans ce Dossier, que les traductions de tout le corpus. C’est énorme. La plupart des lecteurs des Cahiers possèdent déjà une Bible, peut-être deux. Nous leur proposons d’en parcourir l’histoire et d’en déployer les éléments structurants (traduction et annotation, l’une liée à l’autre). Il faut en finir avec l’adage traduttore/traditore – dont la meilleure traduction (!) serait « traduction/trahison » – que l’on dit remonter au XVIe siècle. Qui détermine la trahison ? La sincérité des traducteurs n’est certes pas gage de vérité et la fidélité qu’ils revendiquent peut être discutée. Mais avant de discuter, il faut revenir sur ce qu’est l’acte de traduire, ses présupposés, ses incidences, ses risques. Ce Dossier voudrait y aider.
Cahier Évangile n° 157
70 pages, SBEV/Éd. du Cerf, septembre 2011 (9 euros)
Sommaire du numéro
DOSSIER : « Traduire la Bible en français »
par Jacques Nieuviarts et Gérard Billon
p. 03 – Rares sont ceux qui lisent la Bible dans ses versions « originales » hébraïque, araméenne et grecque (et lorsque c’est le cas la distance temporelle et culturelle demeure). Traduire est donc indispensable. C’est un lieu de passages. Le lecteur d’aujourd’hui passe dans une culture étrangère, un texte étranger passe dans le langage du lecteur. Pour ce dernier, il y va de l’écoute de la Parole du Dieu vivant. Après une première réflexion sur le dialogue des langues, nous relèverons quelques caractéristiques de traductions anciennes et modernes de la Bible. Puis nous affronterons la question de l’acte de traduire, ses tenants et aboutissants, avant de conclure sur la tradition de lecture qui la porte et qu’elle porte.
p. 4 - Traduire : un échec programme ? >>>À lire
p. 10 - I - La Bible au pluriel
La Septante
Le targoum
La Vulgate
La Bible de Luther
Pour des communautés de croyants >>>À lire
p. 26 - II - Des Bibles en français
La fabrique littéraire
Les héritiers de Louis Segond
À l'ombre de la Bible de Jérusalem
La Bible nouvelle traduction
L'exception française
p. 38 - III - L'atelier du traducteur
La source et la cible
Passages >>>À lire
Texte et paratexte
p. 59 - Pour aller plus loin
p. 60 - Liste des encadrés
p. 5 - De la fidélité
p. 11 - La Septante et les chrétiens
p. 15 - Qu’est-ce que traduire ? Le modèle d’Onqelos
p. 18- La Vulgate, édition « authentique »
p. 23 - Les 26 traductions françaises disponibles >>>À lire
p. 29 - Une lutte de géant
p. 33 - Traduction : faire goûter une saveur « originale »
p. 35 - Rendre aux textes leur étrangeté
p. 37 - Quelqu’un d’autre
p. 40 - « Nigra sum sed formosa » >>>À lire
p. 42 - Étranger dans sa propre langue >>>À lire
p. 44 - Les manipulateurs de la langue et le savant >>>À lire
p. 46 - La première parole humaine
p. 48 - « Au commencement… »
p. 51 - « Ecce virgo concipiet »
p. 57 - Sans traduction, pas de christianisme
ACTUALITÉS
p. 61 - Des livres
Philippe Haddad, La Torah
James L. Kugel, La Bible expliquée à mes contemporains. Guide des lectures d’hier et d’aujourd'hui
Matthieu Rouillé d’Orfeuil, La littérature antique à la lumière de la Bible
Jean-Daniel Causse, Élian Cuvillier, André Wénin, Divine violence. Approche exégétique
et anthropologique
Raymund Schwager, Avons-nous besoin d’un bouc émissaire ?
Jacques Vermeylen (éd.), Les prophètes de la Bible et la fin des temps
Jean-Marie Auwers et alii, Psaumes de la Bible et psaumes d’aujourd’hui
Bertrand Pinçon, Qohélet. Le parti pris de la vie
Chantal Reynier, Tempêtes : quatre récits bibliques. L’homme, la nature, la mort
Flavius Josèphe, Les Antiquités juives, vol. V. Livres X et XI
Voir recensions 2011
p. 71 - Brèves