Judith décapitant Holopherne ! Qui n’a en mémoire une image de Lucas Cranach ou d’Artemisia Gentileschi, un air de Vivaldi, une phrase de Jean Giraudoux ou de Paul Claudel (voire de Michel Leiris) ? Aimé des artistes, le livre de Judith pose pourtant bien des questions à la conscience morale. En 1903, le P. Prat avertit prudemment : " L’Écriture n’approuve pas tout ce qu’elle raconte ; et, même dans ses saints personnages, elle ne propose pas toutes les actions indistinctement à notre imitation… " (
Dictionnaire de la Bible , art. " Judith ", col. 1823-1824). Le pasteur Randon est plus catégorique : " L’auteur préconise sans scrupule la duplicité, la coquetterie et l’assassinat. De telles armes, mises au service de Dieu et atteignant leur but par sa bienveillante protection, cela ne peut être pour nous qu’un scandale. La beauté indéniable de certaines déclarations ne saurait nous faire excuser ce trait odieux du fanatisme. Judith priant pour la réussite de son mensonge, et attribuant au Seigneur l’heureux accomplissement de son crime ne peut que révolter la conscience chrétienne " (
Les livres apocryphes de l’Ancien Testament, Paris 1909, p. 261). On pourrait multiplier les citations de ce genre jusque dans nos récentes traductions annotées de la Bible.
Le " Dossier " propose un guide de lecture qui ne veut pas éluder ces questions et qui souligne une double particularité du récit. D’une part, Judith renvoie à des événements contemporains de son écriture, à savoir la résistance des Maccabées au tyran grec Antiochus IV Épiphane (IIe s. av. J.-C.). D’autre part, le lecteur n’a aucune peine à inscrire l’héroïne dans la lignée d’autres personnages comme Yaël ou David, dont la grandeur tient en une formule lapidaire de St Paul : " ce qui est faible dans le monde Dieu l’a choisi pour confondre le fort " (1 Co 1, 27). Et si c’était l’une des raisons du succès de ce livre ?
Cahier Évangile n°132
64 pages, SBEV/Éd. du Cerf, juin 2005 Sommaire du numéroDOSSIER : " Le livre de Judith ou La guerre et la foi "
par Daniel Doré p. 03 Ce
Cahier Évangile se présente comme un commentaire cursif. Au fil du récit, reprenant les divisions établies dans la structure littéraire, il veut accompagner une lecture dans une Bible de travail. Des citations d'auteurs explicitent ici une difficulté du texte, là le comportement d’un personnage, ailleurs un indice sur l’époque de composition du livre. Mais surtout, renvoyant à l'écriture biblique avec ses multiples évocations – la ruse de Tamar, le meurtre d'Eglôn, la geste de Yaël, le combat de David contre Goliath, l'intervention d'Avigaïl – ce bref commentaire cherche à typer une nouvelle littérature au croisement du monde hellénistique et de la tradition du judaïsme. Le livre de Judith est un bel exemple d' " inculturation ".
p. 04 – Introduction p. 09 – 1 - Nabuchodonosor le conquérant (1, 1 – 2, 13) p. 09 - Une puissance invincible
p. 11 - La mission d’Holopherne
p. 13 – 2 - La campagne d’Holopherne (2, 14 – 6, 13)p. 13 - Villes conquises, villes soumises
p. 14 - Israël se prépare à la guerre
p. 16 - Les Assyriens rejettent Akhior
p. 19 – 3 - Le siège de Béthulie (6, 14 – 7, 32)p. 19 - Les Judéens recueillent Akhior
p. 20 - Holopherne se prépare à l’attaque
p. 21 - La ville assiégée
p. 25 – 4 - Les projets de Judith (8, 1 – 10, 10)p. 25 - Une veuve estimée
p. 26 - Les projets de Judith
> > > Extrait à lirep. 31 - Départ de Béthulie
p. 33 – 5 - Judith et Holopherne (10, 11 – 13, 10)p. 33 - Dans le camp ennemi
p. 37 - La nuit du banquet
> > > Extrait à lirep. 41 – 6 - Les suites de la victoire de Judith (13, 10 – 16, 25)p. 41 - Retour à Béthulie
p. 42 - Le triomphe de Judith
> > > Extrait à lirep. 48 - Une veuve célèbre
p. 50 – Conclusionp. 92 Liste des encadrés
La structure littéraire du livre de Judith (p. 6) ; La chronologie du livre de Judith (p. 11) ; Fiction et Histoire : le grand prêtre Alkime / Yoakim (p. 23) ; Une veuve pleine de qualités (p. 26) ; La femme avisée (p. 29) ; Hélène, Judith et Marie (p. 31) ; Le Midrash de Gaster (p. 32) ; Une apologie de la haine nationale ? (p. 34) ; Discours d’Akhior et de Judith, parallèles (p. 36) ; Une lecture apocalyptique (p. 40) ; La Juive et l’étranger (p. 45) ; Esther et Judith, figures d’Israël (p. 51).
p. 52 – Pour continuer l’étude ACTUALITÉSÉvénement : " Bulletin Archéologie et Bible ", par Philippe Gruson, Institut catholique de Paris. p. 53 Les archéologues travaillent avec patience et il est rare que leurs publications fassent la une des journaux. Ce bulletin se propose d’attirer l’attention sur quelques fouilles, découvertes ou débats, avec, à chaque fois, une mise au point biblique. Pour le lecteur qui voudrait en savoir davantage, nous renvoyons à la revue " Le Monde de la Bible " (= MdB) qui publie régulièrement articles et chroniques archéologiques accessibles au grand public.
> > > Extrait à lirep. 102 – Des livres - Collectif (Jean-François Bouthors, dir.),
La Bible sans avoir peur - Élisabeth Parmentier,
L’Écriture vive. Interprétations chrétiennes de la Bible- François-Xavier Amherdt,
L’herméneutique philosophique de Paul Ricœur et son importance pour l’exégèse biblique. En débat avec la New Yale Theology School- Cécile Hussherr,
L’Ange et la Bête. Caïn et Abel dans la littérature- Philippe Lefèbvre,
Livres de Samuel et récits de résurrection- ACFEB (Michel Berder, dir.),
Les Actes des Apôtres. Histoire, récit, théologie - Paul Bony,
La Première épître de Pierre. Chrétiens en diaspora - Pierre Prigent,
La Jérusalem céleste - Collectif,
La Jérusalem céleste- Daniel Marguerat (éd.),
La Bible en récits. L’exégèse biblique à l’heure du lecteur. Brèves