Trentième et unième dimanche du temps ordinaire A
Mal 1, 4b – 2, 2b.8-10 :
Malachie est le dernier des prophètes en Israël à avoir pris la parole ; le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il n’est pas tendre à l’égard de son peuple et particulièrement vis-à-vis des prêtres et des lévites : « Vous avez détruit mon alliance. » Ces derniers ont pour mission, non seulement d’offrir les sacrifices et de faire fonctionner la liturgie du temple, mais également d’instruire le peuple afin que celui-ci apprenne à vivre selon la Torah, l’enseignement que Dieu lui donne. Cet enseignement consiste également à dire ce qui est juste, et ce qu’il convient de faire en telle ou telle circonstance. Or, ils font cela avec partialité. Et donc, la loi, ce don que Dieu fit à son peuple pour qu’il vive l’alliance, la loi devient une occasion de chute : elle n’est plus source de justice qui protège la multitude des petites gens.
À ces hommes consacrés à Dieu, il semble que la présence de Dieu dans le temple ne soit pas une bénédiction suffisante : ils tentent d’en tirer un profit matériel. Le ton est rude, mais il faut bien cela pour que prêtres et lévites prennent conscience que tout le peuple vit sous le regard d’un même Père.
Ps 130 :
À l’opposé de l’attitude condamnée par le prophète Malachie, le psalmiste invite à la simple et humble confiance envers Dieu : comme un enfant dans les bras de sa mère. Rencontrer le Seigneur est la seule ambition de l’homme de Dieu.
1 Th 2, 7b-9,13 :
Après avoir rendu grâce pour la foi naissante de la communauté de Thessalonique (cf. deuxième lecture de dimanche dernier), Paul raconte avec émerveillement et enthousiasme comment l’annonce de l’Évangile fut accueillie par les Thessaloniciens : « Vous avez accueilli la parole de Dieu pour ce qu’elle est réellement, non pas une parole d’homme, mais la parole de Dieu qui est à l’œuvre en vous, les croyants. » Cette reconnaissance de la parole articulée par un homme, comme si elle était portée par le souffle (=l’Esprit) de Dieu lui-même, cela se nomme la foi.
Mais le plus important et le plus étonnant dans ce passage, c’est que Paul insiste sur la transformation qui se produit en lui : en annonçant l’Évangile, il devient doux et prend des décisions déterminantes pour la suite de son existence : le choix de continuer à travailler de ses mains, et de ne pas vivre aux dépens de la communauté, afin de n’être à la charge de personne. L’Évangile ne peut être reconnu pour ce qu’il est, une parole venant de Dieu, si celui qui l’annonce n’accepte pas d’être transformé par son propre message.
Mt 23, 1-12 :
Dans ce paragraphe, les propos de Jésus à l’égard des pharisiens sont extrêmement rudes. Pourtant, ce que nous savons de ces derniers nous permet de dire aujourd’hui qu’ils étaient des gens bien : pleins d’espérance, soucieux d’instruire le peuple ; s’ils attachaient une importance particulière à la visibilité de la pratique de la Torah, ils n’en étaient pas moins fidèles, sincèrement. On peut même dire que parmi tous les groupes qui composaient le judaïsme du premier siècle, c’est des pharisiens que Jésus était le plus proche. S’il leur fait des reproches aussi vigoureux, cela ne peut aucunement nous servir à critiquer nos frères juifs aujourd’hui. La première lecture montre qu’il n’est pas rare qu’un prophète ou un prédicateur invective avec vigueur ses coreligionnaires.
Ce que Jésus refuse, c’est qu’un groupe s’arroge le privilège de l’Alliance au dépend des frères : vous n’avez qu’un seul Père, comme le disait Malachie. Mais plus profondément encore, il invite à renouveler totalement la compréhension de l’alliance : ce n’est pas la fidélité à la Torah qui fait entrer dans le royaume. C’est la fidélité de Dieu qui fera entrer dans le royaume les personnes à qui il l’a promis. La loi ne peut servir à classer les plus fidèles d’entre les fidèles : elle donne le chemin de l’humble réponse que nous pouvons faire à Dieu qui nous appelle dans en son royaume.