Douzième dimanche du temps ordinaire A
Jr 20, 10-13 :
Le prophète Jérémie est connu pour se lamenter devant Dieu. Le texte que nous proclamons ce dimanche en est une illustration. Par des propos incisifs, Jérémie fait à Dieu lui-même des reproches, il veut même lui intenter un procès : pourquoi les méchant réussissent-ils ? Pourquoi Dieu ne donnet-il pas la pluie ? Pourquoi le prophète est-il accusé ? Autant de questions que nous pouvons faire nôtres. À la toute fin, Jérémie dénonce devant Dieu ceux qui attendent sa chute. En effet, le prophète les invite à renouveler leur fidélité dans l’alliance ; eux attendent de pouvoir le prendre en flagrant délit d’infidélité, cela justifierait leur propre conduite et annihilerait la prédication du prophète.
Pourquoi Dieu permet-il cela ? Le prophète est sûr que Dieu ne peut tolérer une telle situation, aussi chante-t-il par avance, dans la dernière phrase du texte, la louange que la justice de Dieu lui occasionnera.
Ps 68 :
Ce long psaume 68 fait entendre la plainte du juste persécuté. En raison de sa fidélité à Dieu, il est maintenant isolé, comme un étranger pour ses propres frères. Ceux-ci le traitent comme un inconnu, puisqu’il place avant tout son zèle pour le service de Dieu. Avant tout, c’est-à-dire avant les liens de chair, lesquels ne sont pas effacés mais intégrés dans l’alliance entre Dieu et son peuple. Comme Jérémie, le psalmiste sait que Dieu lui fera justice.
Rm 5, 12-15 :
Ce court paragraphe est peut-être le plus compliqué que Paul ait écrit. Son idée principale est de comparer Jésus avec Adam, le premier être humain de l’histoire. Ce dernier est la figure de celui qui devait venir. Ainsi, pour Paul, lire le Livre de la Genèse revient à éprouver la nécessité que vienne celui qui, en réponse à la désobéissance d’Adam, viendra obéir au Père, d’une obéissance si absolue qu’elle entraînera ses frères en humanité, dans une semblable obéissance.
Paul prend bien soin de souligner qu'il y a une réelle disproportion : il n’en va pas du don gratuit comme de la faute. L’obéissance de Jésus n’est pas un phénomène compensatoire, qui vient rééquilibrer ce que la désobéissance d’Adam a introduit comme désordre dans le monde. La fidélité de Dieu, telle qu’elle se manifeste dans l’obéissance de Jésus, va bien au-delà : elle est surabondance de grâce. Elle offre, à tous, la possibilité de se décider maintenant afin de vivre de manière renouvelée, dans cette obéissance que l’on appelle la foi : ce qui est juste au regard de Dieu, c’est que l’on croit ce qu’il dit et qu’on le mette en pratique.
Mt 10, 26-33 :
Dans la suite de l’envoi en mission de ses disciples, Jésus annonce qu’en accomplissant ce qu’il leur demande, ils rencontreront des oppositions, jusqu’aux persécutions. Pour inaugurer le règne de son Père, le Seigneur Jésus lui-même dut passer par la passion et par la croix ; pareillement, ses disciples ne pourront pas devenir messagers de l’Évangile sans être eux-mêmes appelés à emprunter ce chemin. L’Évangile annoncé ne protège pas des difficultés de l’existence ; il expose et fragilise celui qui l’annonce. C’est ainsi que l’Évangile apparaît comme la seule force capable de transformer l’existence ; sa puissance, sa force de persuasion, n’est aucunement liée aux qualités du messager. L’apôtre de Jésus est alors comme contraint de vivre ce qu’il annonce : l’abandon entre les mains du Père. Celles-ci ne sont pas tendues comme celles d’un marionnettiste qui manipule et tire les ficelles, mais elles sont paumes ouvertes vers le haut, prêtes à récupérer ce qui tombe à terre : rien n’est insignifiant aux yeux du Père, surtout pas les moineaux, que dire alors de nos existences humaines !