Vendredi Saint A
Is 52, 13 – 53, 12 :
Ce poème est à sa façon, lui aussi, comme les textes proclamés hier, le récit d’un événement fondateur. Quelques disciples d’un prophète sont atterrés par la mort de leur maître. Quelle est la raison de cette injustice ? Certains affirment qu’il est châtié en raison son message ; son espérance était un blasphème qui ne prenait ni Dieu, ni la situation au sérieux.
L’espérance que le prophète a fait naître dans le cœur des disciples les invite à aller au-delà et ils sont maintenant capables de dire que celui qui était maltraité est maintenant source de paix. Ils parviennent même à croire et à espérer que l’histoire de leur maître est une clé pour comprendre l’histoire d’Israël tout entier.
Le peuple dispersé lui aussi sera rassemblé parce que Dieu fait toute chose nouvelle et que nul ne peut connaître les chemins qu’il prendra. Aussi ils osent dire comme une parole venant du Seigneur que le serviteur humilié montra, il se lèvera, il sera exalté. Israël renouvelé et rassemblé à Jérusalem est source de louange pour toutes les nations.
Aujourd’hui, nous croyons, que ce qui a été chanté et proclamé par ce prophète du VI° siècle avant JC est une prophétie de ce que Jésus a vécu pour renouveler les chemins de l’alliance entre Dieu et Israël, et ainsi ouvrir une route nouvelle pour toute l’humanité.
Ps 30 :
Ce psaume que nous chantons lors de cette liturgie du Vendredi Saint est une leçon d’espérance. Quand Jésus meurt, il rend son dernier souffle comme on dit, mais ce faisant il donne son esprit (esprit et souffle se disent par un même mot en grec). Il le remet entre les mains du Père pour que celui-ci puisse le faire reposer sur celles et ceux qui font de cet événement le point de départ d’une existence nouvelle : soyez forts, prenez courage, vous tous qui espérez le Seigneur !
Hb 4, 14-16 ; 5, 7-9 :
La mort de Jésus est à un point de départ pour toute l’humanité parce qu’il est venu prier, aimer, espérer à ce point de l’existence humaine où tout cela semble impossible : cette peur de la mort qui nous tient en esclavage. Ainsi, de la mort de Jésus nous avons reçu la grâce de son secours : être renouvelée dans l’humanité.
Ce portrait de Jésus exerçant une fonction sacerdotale fait de sa mort, de sa prière dans la peur de la mort, une intercession pour toutes celles et ceux qui sont saisis par la peur de la mort (cf. Hb 2, 14).
Jn 18 – 19 :
Quand l’Église est-elle née ? Au moment de la mort de Jésus. Marie et Jean dont les relations sont transformées par la parole de Jésus, sont le début de cette nouvelle communauté qui reçoit l’Esprit que Jésus remet, qui reçoit le sang et l’eau qui sortent du côté de Jésus, signe de vie totalement donnée, signe d’amour, signe d’alliance vécue dans le baptême et l’eucharistie.
Au sujet de la liturgie du Jeudi Saint nous disions que l’Église est née dans la fraction du pain et la bénédiction de la coupe, dans le lavement des pieds ; maintenant c’est dans la mort de Jésus. Et la résurrection alors ? Bien sûr sans la résurrection aucun de ces moments n’a la force d’engendrer. Mais si Jésus ne pose pas avant de ressusciter les gestes du Jeudi Saint, s’il ne vit pas la passion du Vendredi Saint alors il ne rejoint pas l’ensemble de l’humanité (cf. la deuxième lecture) et nous ne pouvons pas faire mémoire de la liberté de Jésus à venir se faire l’un de nous jusque dans la mort.
Jésus n’a pas besoin de mourir pour être transfiguré, il meurt pour nous ressusciter avec lui. En ce sens, la scène de Marie et Jean au pied de la croix est bien le récit d’une naissance.