Jeudi Saint A
Ex 12, 1-8. 11-14 :
Ce texte nous rapporte les prescriptions rituelles pour célébrer la Pâque en Israël. Il relate en fait la véritable naissance du peuple d’Israël. Habituellement, nous pensons que c’est la sortie d’Égypte et le passage de la mer Rouge qui font la naissance d’Israël. Cela est vrai bien sûr. Mais ce sont les prescriptions par lesquelles Israël va faire mémoire de cet événement qui permettent au peuple d’Israël d’exister comme tel, comme peuple de l’alliance, comme peuple sacerdotal (cf. Ex 19, 6).
Pareillement, aujourd’hui, les rabbins enseignent que c’est la pratique du sabbat qui garde Israël à travers les âges.
Il faut prendre le temps de visualiser la position de ces hommes qui célébrèrent la Pâque avant de quitter l’Egypte : debout prêts à partir. Le rituel que Dieu enseigne à Moïse met le peuple dans cette posture par laquelle il peut laisser Dieu lui ouvrir la route de la liberté qu’il est maintenant prêt à prendre.
Ps 115 :
Comment remercier Dieu de la libération qu’il octroie à son peuple et à chacun d’entre nous ? Le psalmiste partage sa conviction : il lui faut pour cela invoquer le nom du Seigneur. Ce nom même que Dieu révéla à Moïse et qui fut pour celui-ci une force afin qu’il permette au peuple d’entendre la parole de Dieu qui invite à quitter l’Égypte pour la terre promise. Invoquer le nom de Dieu, ne signifie pas le mentionner constamment mais implique de faire de sa vie une réponse à la parole libératrice qu’il nous adresse.
1 Co 11, 23-26 :
Ce récit fort succinct nous relate le dernier repas de Jésus et nous apprend comment l’Église prend vie. Le raisonnement est le même que pour la première lecture. C’est bien la mort et la résurrection de Jésus qui nous offrent le salut et l’accès à la vie éternelle. Mais sans les gestes de la fraction du pain et de la bénédiction de la coupe, célébrés comme Jésus nous l’enseigne, sans ces gestes-là, l’Église ne peut exister, puisqu’elle ne peut se nourrir de la mémoire de la mort et de la résurrection de Jésus.
Ainsi, l’Église prend-elle corps lorsqu’elle célèbre l’eucharistie, en ayant conscience qu’elle vit ces gestes dans l’attente du retour de son Seigneur. Ce qui engendre l’Église, ce qui lui donne vie et souffle, c’est l’espérance du retour de celui qui lui donne la vie.
Jn 13, 1-15 :
Lorsque l’évangéliste Jean compose le récit du dernier repas de Jésus, il connaît les textes rapportés par Paul, Marc, Matthieu et Luc. Il connaît les gestes de la fraction du pain et de la bénédiction de la coupe. Il sait, car il les vit et qu’il en vit ; il sait que ces gestes-là engendrent l’Église. Pourtant, lui qui a assisté à cette soirée mémorable, il se souvient d’un autre geste de Jésus : le lavement des pieds. Nous entendrons demain, Vendredi saint, dans le récit de la passion selon ce même évangéliste Jean, que c’est au pied de la croix que naquit l’Église. Mais le geste mémoriel, qui permet de vivre de cet engendrement, est pour Jean non pas la faction du pain et la bénédiction de la coupe, mais celui de l’humble service fraternel : l’abaissement devant le frère, en acceptant la posture de l’esclave, pour lui laver les pieds. C’est un exemple que je vous ai donné afin que vous fassiez, vous aussi comme j’ai fait pour vous. Pour que nous vivions la Pâque, pour qu’ensemble nous prenions la route de la liberté, il nous faut nous mettre au service les uns les autres.