Dimanche des Rameaux A
Mt 21, 1-11 :
Cet épisode qui nous raconte l’entrée de Jésus à Jérusalem, acclamé par ses disciples, eut lieu possiblement dans le cadre de la fête des tentes ; il nous est raconté comme l’arrivée d’un roi venant prendre possession de sa capitale. La trame de fond sur laquelle s’appuie l’évangéliste Matthieu pour narrer un événement relativement simple est offerte par les prophéties du livre de Zacharie (Za 9 – 14) :
• Au chapitre 9 l’arrivée sur un ânon, signe d’une royauté paradoxale.
• Au chapitre 14, la descente du mont des Oliviers (Za 14, 4), l’entrée dans le temple, et les marchands qui sont chassés du temple (Za 14, 21) ; juste après cet évangile, Matthieu nous raconte l’épisode de Jésus chassant les marchands du temple.
La prophétie de Zacharie annonce la venue d’un roi messie dont l’exercice du pouvoir serait bien différent : par la douceur et sans s’appuyer sur la puissance économique.
Mais, il nous faut reconnaître que Jésus va beaucoup plus loin que ce que disait le prophète : nul n’a jamais imaginé qu’un roi exerce le pouvoir en acceptant de mourir sur la croix.
Is 50, 4-7 :
Le prophète est à la peine : il lui faut annoncer au peuple ce que celui-ci n’arrive pas à entendre. Il ne s’agit pourtant pas d’un message de condamnation, mais bien d’un message d’espérance : Dieu veut consoler son peuple ; Lui-même n’est nullement défait par les idoles païennes et conserve toute sa puissance pour prendre soin de ceux qu’il a élus.
Que de moqueries sont suscitées en retour d’une telle espérance ! Le prophète tient bon, animé par la force du message qu’il annonce, faisant face à ses détracteurs.
Ps 21 :
Ce poème est l’expression d’un homme abandonné par tous. On espérait que sa proximité avec Dieu soit pour tous une source de bénédiction, mais puisqu’il semble abandonné de Dieu, alors on le traite comme un condamné à mort.
Ph 2, 6-11 :
Jésus a pris la condition d’esclave ! Au cours de sa vie à Nazareth, Jésus n’avait pas ce statut d’esclave, il vivait humblement et modestement du fruit de son travail. Lorsqu’il fut crucifié, il eut effectivement un tel statut puisque la crucifixion est le châtiment qui leur était réservé.
Ce plus ancien poème chrétien nous montre bien que Jésus aurait pu, devant le Père comme devant les hommes, revendiquer un autre statut. C’est donc un choix libre et souverain du Seigneur Jésus qui le conduisit à la croix. Pour que nous participions avec lui à la gloire de Dieu son Père, il accepta ce statut d’esclave, venant ainsi nous rejoindre dans l’esclavage du péché pour nous en libérer.
Mt 26 – 27 :
Matthieu s’arrête sur une multitude des détails qui, selon lui, aident le lecteur à comprendre ce qui se passe dans la mort de Jésus, Messie, Fils de Dieu. Ainsi le suicide de Judas est-il éclairé par une chaîne de citations. Alors s’accomplit la parole adressée par Jérémie le prophète : « et ils prirent les trente deniers, le prix estimé qu’ils estimèrent pour les fils d’Israël et ils le donnèrent pour le champ du potier comme me l’avait ordonné le Seigneur » (Mt 27, 9-10).
Les trente deniers, le prix de la trahison, correspondent à la somme nécessaire pour racheter un esclave (Ex 21, 32) : jusque dans les moindres détails de sa passion le Seigneur prit la dernière place ! Cette somme est également celle qui fut versée à Zacharie pour le congédier de sa charge prophétique (Za 11, 12, cf. première lecture). Ce geste montre combien ses paroles sont tenues en piètre estime ! Ce salaire humiliant est restitué par Zacharie, sur l’ordre du Seigneur, au fondeur, dans la Maison du Seigneur (Za 11, 13). Or, le fondeur en hébreu signifie également le potier. Et le champ acheté par les grands prêtres se nomme justement champ du potier (Mt 27, 10). Ce champ est le signe du mépris accordé aux paroles de Jésus, comme pour Zacharie, mais également de la liberté de Jésus qui savait bien quel sort était réservé aux prophètes.