Cinquième dimanche du temps ordinaire année A
Is 58, 7-10 :
Dans la Jérusalem de la période perse, après le retour d’exil, les temps sont difficiles. Les disparités religieuses et sociales sont nombreuses, et il semble aux yeux de tous que la bénédiction promise à la ville que Dieu a choisie soit devenue inaccessible.
Le livre du prophète Isaïe prend en compte les malheurs de cette époque, temps de ténèbres plus que de paix. Pour lui un seul remède : la justice, le soin des plus pauvres, des affamés, des mal lotis.
Son message est étonnant : ces gestes vont pouvoir dissiper les ténèbres, faire la lumière, permettre la rencontre avec le Seigneur, qui pourra alors se présenter à son peuple. Le soin du prochain le plus déshérité fait œuvre de lumière parce qu’il permet, à celui qui donne comme à celui qui reçoit, de découvrir la gratuité de l’existence et de la présence à Dieu. Dans le partage, tout le monde est positionné au même point de l’être, celui où la vie est lumineuse.
Ps 111 :
Ce psaume est une hymne de sagesse qui décrit la personne humaine selon le cœur de Dieu : homme de justice, de tendresse et de pitié. La justice seule ne suffit pas, si elle n’est pas prête à déborder dans la tendresse et la pitié. Ces dernières ne sont rien si elles ne sont pas appuyées sur le sens de la justice. Cet homme de justice, de tendresse et de pitié est prêt à donner de lui-même pour que l’autre ait ce qui lui revient.
1 Co 2, 1-5 :
Dans ce court paragraphe, Paul précise quelle est sa mission d’apôtre, d’envoyé, du Christ Jésus. Il n’a rien d’autre à faire que de l’annoncer lui, le Messie crucifié. Nous sommes habitués à cette expression et peut-être ces propos nous semblent-ils redondants. Pour autant, l’expression Messie crucifié est inaudible aux oreilles d’un juif du premier siècle. Dire que le Messie, lui qui a pour mission de réaliser la bénédiction d’Israël et de l’ouvrir aux nations, dire que celui qui est investi de l’Esprit de sagesse et de force puisse être crucifié, c’est-à-dire mis à la place des parias et des maudits, dire cela constitue un scandale (cf. 1 Co 1, 23-24).
C’est ce même scandale qui conduisit Saül de Tarse à persécuter l’Église : avant qu’il ne rencontrât le Ressuscité, il était pour lui insupportable de laisser tenir de tels propos qui relevaient de l’ineptie et de la folie.
Par la suite, Paul fut de tous les apôtres celui qui donna le plus d’importance à ce point. Il ne sert à rien d’annoncer que Jésus est ressuscité si l’on n’insiste pas sur la croix qu’il accepta pour nous ressusciter avec lui. C’est cette insistance que Paul nomme le langage de la croix (1 Co 1, 18) ; il permet, à qui l’entend, d’être conduit au pied de la croix et tel le centurion romain de dire comme lui : « Vraiment cet homme est le Fils de Dieu » (Mc 15, 39).
Mt 5, 13-16 :
Après avoir prononcé les Béatitudes qui s’adressent à la foule rassemblée autour de lui, Jésus s’adresse à ses disciples, c’est-à-dire à ceux qui acceptent de porter le message de Jésus à ceux qui en ont besoin et qui y ont droit. Cette mission s’exprime par deux images.
La première, celle du sel, dit la discrète présence des disciples : un plat trop salé est immangeable tandis qu’une pincée de sel relève le goût. L’Évangile est cette pincée de sel, cet ensemble de petites paroles qui donnent sens à la vie. Sens, goût, saveur, sagesse : dans les langues anciennes, ces mots se recoupent dans leur étymologie, populaire ou scientifique.
Autrement, l’image de la lumière appelle à remplir l’espace, non pas des paroles mais par des gestes, des bonnes actions, qui, comme l’enseigne Isaïe (cf. première lecture) font la lumière. C’est entre ces deux images, sans contradiction, que l’Église doit trouver le chemin de son témoignage.