Ne 8, 2… 10 :
L’épisode qui nous est rapporté dans cet extrait du livre de Néhémie constitue un moment important dans l’histoire du judaïsme : c’est la première proclamation publique de la Torah. Revenant de l’exil à Babylone, Esdras, le scribe de famille sacerdotale, ainsi que nombre de prêtres qui l’ont accompagné sur ce chemin du retour, proclament publiquement cette loi dont l’écoute et l’observance sont l’essence même du judaïsme.
C’est dans un contexte joyeux, au cours d’une fête liturgique, que se déroule cette proclamation ; L’invitation à la joie qui termine cette première lecture offre une réflexion étonnante : la joie du Seigneur est notre rempart.
Le peuple est dans la joie parce qu’avec la Torah, il peut retrouver les moyens de vivre l’alliance avec le Seigneur ; mais le don de cette loi indique surtout que c’est Dieu qui est dans la joie de voir son peuple ainsi disposé sous son regard. Contre toute forme d’accusation qui dénierait le droit de vivre dans l’alliance voire de vivre tout simplement, le meilleur rempart, le seul peut-être, c’est d’accueillir la joie de Dieu de nous voir vivre sous son regard.
Ps 18 :
L’extrait du psaume que nous méditons ce dimanche nous invite à reconnaître les bienfaits de la Torah : elle donne vie, elle rend sage, elle réjouit, elle donne l’assurance devant Dieu et devant les hommes. Plus étonnamment elle clarifie le regard. Il faut se rappeler que pour les anciens les yeux ne servent pas à capter la lumière extérieure mais à projeter la lumière intérieure sur le monde. La parole de Dieu est une lumière qui brille à l’intérieur de nous-mêmes et nous permet de comprendre le monde et de nous y repérer : elle clarifie le regard.
1 Co 12, 12-30 :
Dans ce texte, si célèbre, Paul compare la communauté chrétienne un corps. Il était habituel chez les stoïciens, un texte de Sénèque en atteste, de comprendre un groupe humain comme un ensemble organisé, tel un corps et ses membres. Aussi, de façon fort usuelle, Paul utilise-t-il cette métaphore pour dire que personne ne peut décider, pour lui-même ou pour les autres, de l’appartenance d’un membre au corps : la main ne décide pas d’en être ou de n’en pas être et ainsi de suite ; pas plus elle ne peut décider de l’appartenance des autres membres.
L’originalité du propos de Paul réside dans la mention des membres les plus faibles ; en cela, il est bien fidèle au message de Jésus, qui mit au centre de la communauté, ceux qui ont besoin que l’on prenne soin deux. Paradoxalement les pauvres, par l’attention et le soin même qu’ils requièrent deviennent des membres essentiels puisqu’ils favorisent l’unité de la communauté : ils rendent possible ce mouvement par lequel chacun peut s’approprier la joie ou la peine de l’autre.
Lc 1, 1-4 ; 4, 14-21 :
L’Évangile que nous proclamons ce dimanche regroupe deux paragraphes fort éloignés dans le récit que Luc compose. Dans un premier temps, nous entendons le prologue par lequel Luc dédicace son livre à son ami Théophile, ce qui veut dire l’ami de Dieu. Le texte qui va suivre est offert à tout ami de Dieu pour qu’il vérifie la solidité des enseignements qu’il a déjà reçus. Luc espère que la cohérence de son récit permette à son lecteur d’affiner son regard sur la personne de Jésus et de mieux croire en lui, de mieux l’aimer, de vivre une plus grande espérance de son retour.
Le second paragraphe relate la première activité de Jésus après son baptême et l’épreuve au désert : il est à Nazareth lisant les Écritures un jour de sabbat. Le commentaire que Jésus fait est aussi court que simple : les promesses contenues dans ce livre commencent à se réaliser dès maintenant. Jésus méditant les écritures et les proclamant publiquement entend la voix de son Père l’appeler à porter la bonne nouvelle aux malheureux, à consoler les endeuillés etc.
Il est intéressant de noter que Jésus n’écrivit rien ; il se présente à nous, non comme un auteur savant, mais comme un lecteur passionné et assidu. Il est un modèle de lecteur disposé à mettre en oeuvre l’espérance qu’il reçoit dans sa lecture ; il est un lecteur modèle qui réalise les espérances de l’auteur du texte, son Père.