Paul souligne que c'est l'avenir, le Jour du Seigneur attendu dans l'espérance, qui fonde tout à la fois l'Église du Christ et l'espérance chrétienne....

Nous avons vu que Paul parle aux Thessaloniciens du présent de leur vie chrétienne en église en leur rappelant les origines de leur communauté, ainsi que les origines de la foi chrétienne dans le mystère de la mort et de la résurrection du Christ. Mais plusieurs fois déjà nous avons remarqué qu'il tourne le regard des chrétiens vers l'avenir (1,10 etc.); enfin, dans les deux exhortations « eschatologiques » de 4,13-5,11, c'est franchement l'avenir qui éclaire le présent : espérer « être avec le Seigneur » et « ensemble, vivre avec lui » donnent à la vie chrétienne son dynamisme et son orientation.

Ce mouvement de la pensée paulinienne constitue une mise en garde à l'adresse de tous ceux qui réfléchissent sur l'Église : la lumière ne vient pas tout entière de ses origines, y compris du personnage historique hors pair nommé Jésus, malgré l'influence exceptionnelle que son enseignement et ses actes ont pu avoir sur elle. Sans ce regard vers l'avenir promis, l'Église courrait le risque de se dégrader dans la répétition du souvenir de plus en plus exténué d'un « fondateur » de plus en plus éloigné dans le passé. Or, paradoxalement, la visée eschatologique fait en sorte que le « fondateur » de l'Église ne s'éloigne pas dans le passé à mesure que les siècles passent : plus le temps s'écoule, plus il est proche ! Ainsi, c'est dans l'espérance de cette venue que Paul trouve les ressorts principaux de son exhortation. L'exhortation à « veiller » aurait pu être fondée sur certaines paroles de Jésus : Paul semble les connaître, car son langage est très proche de celui de la tradition évangélique; pourtant, c'est l'avenir, le Jour du Seigneur attendu dans l'espérance, qui fonde cette consigne.

Cette orientation vers la Parousie de son Seigneur permet aussi à l'Église de ne pas se dégrader en se contentant d'emprunter ses espérances et ses objectifs à des mouvements d'idées appartenant à « ce monde-ci » et de gérer le présent tant bien que mal. Bien sûr, l'Église est concernée par les espérances des hommes, mais ce ne sont pas elles qui lui donnent son sens ultime et qui motivent ses actions.

C'est pourquoi Paul n'admettra jamais qu'une Église, sous prétexte de vivre le présent dans l'Esprit Saint, en vienne à oublier et le Christ ressuscité, et l'Espérance de sa venue.

© Michel Trimaille, SBEV / Éd du Cerf, Cahier Évangile n° 39 (février 1982), « La première lettre aux Thessaloniciens », p. 68 (encadré).