La contemplation consiste à se rendre de plus en plus présent à celui qui est présent...

Dissipons d’emblée un malentendu qui est l’une des principales pierres d’achoppement de la vie spirituelle : la réalité de la présence de Dieu ne se confond pas avec l’expérience sensible de sa proximité et de sa douceur qui est parfois offerte. Il arrive en effet que la contemplation nous fasse ressentir la plénitude de la présence de Dieu, la paix, la joie et la lumière de son amour pour nous. C’est un cadeau, ce n’en est pas le fruit. C’est une grâce particulière dont nous pourrons faire mémoire quand la contemplation sera plus aride, et qui nous soutiendra lorsqu’il nous faudra persévérer simplement dans la foi, ce qui est la situation la plus habituelle. Guigues y consacre l’un des plus beaux chapitres de sa lettre (chap. X).

Le don réciproque
La contemplation consiste à se rendre de plus en plus présent à celui qui est présent. C’est précisément l’objectif de la pédagogie de la lectio divina dont nous pouvons maintenant ressaisir le processus : par l’accueil de sa Parole (lectio) et par le cheminement de la Parole en nous (meditatio), nous avons découvert que, dans le Christ, le Père nous a tout donné. Nous avons alors appris à répondre par notre parole à sa Parole (oratio) et à exprimer notre désir de recevoir ce don et d’en vivre. La contemplation nous conduit maintenant à vivre de ce don et surtout à répondre par le don de nous-mêmes au don qu’il nous fait de lui. C’est le moment du grand consentement de tout notre être à nous livrer entièrement entre les mains du Seigneur, à le laisser agir en nous à sa manière, même si c’est souvent « de nuit », comme le soulignent les mystiques. « Ma grâce te suffit », avait répondu le Seigneur à saint Paul, « la puissance se déploie dans la faiblesse » (2 Co 12,9).

Le don reçu

La contemplation nous conduit à considérer le don de Dieu comme la réalité qui porte en elle à la fois la source et l’orientation de notre existence chrétienne : non plus nous appuyer sur ce qui nous manque pour chercher à l’obtenir, selon la conception « mondaine » de la vie humaine, mais désormais fonder notre vie sur ce qui nous est déjà donné et que nous avons à faire fructifier.

Le don de nous-mêmes

La logique du don que révèle la Parole de Dieu ne consiste pas à donner un peu ni même beaucoup, mais à tout donner. Le don ne se calcule pas, il n’est pas de l’ordre de la quantité, mais de la qualité. Il n’y a de véritable don que lorsque l’on se donne soi-même totalement. La contemplation déploie cette logique du don en l’inscrivant dans la communion d’amour qui lui donne sens ; elle contribue à nous faire comprendre que le don total de nous-mêmes consiste, au quotidien, à s’investir pleinement dans nos engagements, à avoir une vraie qualité de disponibilité dans nos rencontres. En apprenant à être présents à Dieu par la contemplation, nous pourrons l’être tout autant à toute notre vie.



© Christophe de Dreuille, Cahier Évangile n° 164, Lectio divina. Un chemin pour prier la Parole de Dieu, p. 48-49.