Lecture de Mc 16, 1-20L'annonce de la Résurrection (Mc 16, 1-8)
[Veillée pascale – B] Lecture d’ensemble. Les femmes viennent pour honorer celui qui a été mis au tombeau. C'est alors qu'intervient un messager mystérieux. Il annonce l'extraordinaire : la résurrection de celui qu'elles cherchent. Ses paroles résument brièvement tout le récit évangélique. Au corps que les femmes voulaient embaumer se substitue un message de vie (Jésus ressuscité) bouleversant (elles ont peur), qui met en route et ouvre un avenir (aller en Galilée). Mais le récit s’achève paradoxalement sur l’incapacité de communiquer ce message.
Au fil du texte. 1. Les notations chronologiques du v. 2 peuvent évoquer symboliquement un commencement. '' De grand matin '', '' au lever du soleil '' contrastent avec les ténèbres du jour de la mort. Ce sont des indices qui préparent l’annonce de la Résurrection.
2. La question des femmes en chemin s’explique par ce dont elles ont été témoins (la fermeture du tombeau) et met en relief ce qu’elle vont constater : la pierre a été '' roulée ''. Le caractère inattendu d’un tel fait prépare une autre surprise : la présence du jeune homme dans le tombeau.
3. Ce jeune homme est assis à droite. Cette position rappelle celle du Fils de l’homme en gloire (voir 14, 62). Son vêtement blanc est l’indice de son appartenance au monde divin (voir 9, 3).
4. Le jeune homme commence par une exhortation caractéristique des manifestations divines : '' N’ayez pas peur… '' Puis il redit aux femmes l’objet de leur quête ('' vous cherchez… '') avant de leur révéler la résurrection de Jésus. Ainsi est affirmé que c’est bien le crucifié qui est ressuscité. On comprend l’insistance du narrateur sur les yeux des femmes au Calvaire et au tombeau (cf. les verbes '' regarder '' et '' voir '' : 15, 40.47 ; 16, 4.5.6). Elles peuvent attester de la mort. Mais, désormais, le corps laisse place à un message et la vue laisse place à l’écoute. Chez Mc, l’annonce de la Résurrection prime sur la constatation du tombeau vide.
5. La mission des femmes est de rappeler aux disciples ce que Jésus leur a déjà dit avant sa mort (lors du dernier repas, en 14, 27-28). Plus subtilement, si Jésus les '' précède '' en Galilée, c’est que ceux-ci doivent le suivre (voir Mc 8, 34s). La '' suivance '' prend une nouvelle dimension qui relie le souvenir des gestes et des paroles du Nazaréen à la nouveauté de la Résurrection.
6. Les disciples sont envoyés en Galilée, lieu des débuts de la mission de Jésus. Arrivé à son terme, le récit fait une boucle sur lui-même pour que le lecteur relise les événements racontés à la lumière de la Résurrection.
7. La réaction de '' peur '' indique la situation nouvelle dans laquelle les auditeurs de l'évangile de Marc sont installés : la Bonne Nouvelle accueillie en vérité ne peut que bouleverser leur vie. Les femmes sont moins ici la figure de ceux qui annoncent l'Évangile que de ceux qui le reçoivent. L'initia-tive de l'annonce est, elle, du ressort du '' jeune homme '' mystérieux, figure de la Parole divine. À noter qu’au début de l’évangile, Jean Baptiste a lui aussi, selon la citation d’Isaïe, une mission de '' messager '' (grec '' angelo ''s ; 1, 2).
Appendice (Mc 16, 9-20)
[Ascension – B (16, 15-20)
Conversion de St Paul (16, 15-18)
Fête de St Marc (16, 15-20]La première version de l’évangile de Marc se terminait de manière abrupte sur la fuite et la peur des femmes. Un complément lui a été ajouté plus tard, pour une fin plus heureuse. Il suppose connu le reste du N. T. (on y trouve pêle-mêle des échos de Jn 20 ; Lc 24 ; Mt 28 ; Ac 1 ; 2 ; 3 ; 4 ; 8 ; 14 ; 16 ; 28 ; 1 Co 14 ; Jc 5). Il est curieux que la liturgie ait justement choisi ce passage – qui n’est pas de la même main que le reste de l’évangile – pour la fête de saint Marc !
L'initiative divine qui est à l'origine du message évangélique est encore plus soulignée par cette deuxième finale qui présente de façon remarquable la situation de l'annonce pascale conduisant d'abord à une incrédulité (v.11-14) puis à une prédication confirmée par des '' signes '' (v.15-20).
Lecture d’ensemble. La deuxième finale raconte trois apparitions du Ressuscité (v. 9-14) ainsi que l'envoi en mission des disciples dans le monde entier (v. 15-18). Elle se termine par l'ascension de Jésus et par un bref sommaire sur l'activité missionnaire des Onze (v. 19-20).
Au fil du texte. 1. Curieusement, la deuxième finale parcourt la palette du vocabulaire pascal disponible : '' se relever '' (grec '' anistanai '', v. 9), '' vivre '' (grec '' zèn '', v. 11), '' être réveillé '' (grec '' egeirein '', v. 14), '' être enlevé '' (grec '' analambanein '', v. 19).
2. La première apparition est pour Marie Madeleine (selon des éléments empruntés à Jn 20). Du tombeau vide (16, 1-8, première finale) à l'apparition du Ressuscité (v. 9-10, deuxième finale), elle passe du statut de récepteur de l'Évangile de Pâques à celui d'annonceur. Pour elle (v. 8) comme pour les disciples (v. 11 et 13) le message pascal commence par produire peur, recul, refus. C’est dans un deuxième temps que la prédication est rendue possible.
3. L'envoi en mission est universel. Le Salut est offert à tous mais la foi est une condition fondamentale.
4. Quatre des cinq signes qui accompagnent les croyants sont connus par le livre des Actes des apôtres : expulser de démons (Ac 16, 16-18), parler d'autres langues (Ac 2, 1-11), prendre des serpents (Ac 28, 3-6), guérir les malades (Ac 3, 1-10). À la différence des Actes, ces signes ne sont pas réservés aux missionnaires mais ils peuvent être réalisés par tout croyant.
5. L'ascension est décrite selon des termes qui rappellent la venue du Fils de l’homme, tel que de Jésus en a parlé aux membres du Sanhédrin en 14, 62.
6. La coopération du Seigneur à la prédication apostolique se donne à voir dans les '' signes '' qui confirment la parole des missionnaires. Cette phrase résume en quelque sorte le livre des Actes des Apôtres.
© Philippe Léonard, SBEV / Éd. du Cerf
, Cahier Évangile n° 133 (septembre 2005) "Evangile de Jésus Christ selon saint Marc", p. 72-74.
> > > ''Il est ressuscité'' : le vocabulaire de résurrection> > > Le tombeau vide ( Mc 16) : analyse de Jean Delorme