L'étude de ces différents rituels est importante, car leur description permet de préciser la fonction de chacun des sacrifices...
Les chapitres 1 à 7 du livre du Lévitique se présentent tout d’abord comme un ensemble de textes rituels où sont énumérés les différents rites propres à chacun des sacrifices. Pourtant, à y regarder de plus près, on se rend vite compte qu'on est très éloigné d'une description détaillée du rituel sacrificiel, telle que pourrait la donner un ethnologue, et que, sur la base de ces seules indications, on serait bien en peine d'offrir un sacrifice. Il manque, en effet, toute une série de précisions absolument indispensables à la bonne exécution d'un sacrifice. Ainsi, on ne nous dit pas où exactement et à quelle distance de l'autel se fait l'immolation de la victime, comment le sang en est recueilli, dans quel ordre précis se fait le dépeçage, ce que fait le fidèle pendant que les prêtres offrent son sacrifice, où et à quel moment le fidèle mange sa part du sacrifice. En fait, ne sont mentionnés que les seuls rites significatifs de la fonction respective de chacune des catégories de sacrifices. Et ceci n'en rend que plus importante l'étude de ces différents rituels, car leur description va nous permettre de préciser la fonction de chacun des sacrifices.
Les sacrifices sanglants
Les rites communs
La première série de rites est commune à l'ensemble des sacrifices. L'offrant commence par faire approcher sa victime de i'entrée de la Tente de la rencontre, autrement dit, du lieu où réside Dieu. Puis il lui impose la main, ensuite il la met à mort. Cette première série de rites représente la phase négative du don. Les différents rites signifient, tous, le renoncement par l'offrant à son bien au profit de Dieu, et ce, de manière graduée: d'abord par le fait même de présenter la victime à Dieu, puis en exprimant par le geste de l'imposition de la main sa volonté d'y renoncer, enfin en donnant à ce renoncement une forme définitive en immolant la victime.
Il faut bien voir que l'abattage de la victime ne constitue qu'un rite préliminaire et non, comme on l'affirme souvent, I'acte central du sacrifice. Il est d'ailleurs significatif que l'immolation se fasse en marge de l'autel, et non sur l'autel, et qu'elle est effectuée par l'offrant, et non par le prêtre. Un passage du livre d'Ezéchiel (Ez 44,10-14), indique clairement le caractère préparatoire de ce rite. Dans un discours qu'il adresse aux lévites, Dieu les accuse de s'être détournés de lui. En conséquence de quoi, il les dégrade et leur impose comme sanction de devoir égorger les victimes qui, jusque là, I'étaient par les offrants. Ils sont, pour reprendre les termes mêmes du texte, mis au service du peuple, alors que les prêtres, eux, sont au service de Dieu. L'abattage de la victime, on le voit, ne fait pas partie du service de Dieu. On ne saurait donc construire sur la mise à mort de la victime une théorie du sacrifice, comme le font les tenants de la théorie classique de la « satisfaction vicaire » et d'autres à leur suite, pour qui la victime subit la peine de mort qui aurait dû frapper i'offrant.
Les rites spécifiques
La seconde série de rites varie selon les sacrifices. Ce sont ces rites-là qui manifestent la spécificité de chacun d'entre eux. À la différence des rites préliminaires, ces rites sont exclusivement effectués par les prêtres. Ce sont les rites sacrificiels proprement dit.
L'holocauste
Il a comme caractéristique distinctive d'être intégralement brûlé sur l'autel, à la seule exception de la peau, laquelle revient au prêtre officiant (Lv 7,8). Cette combustion se fait en deux temps, par ordre d'importance décroissante: d'abord les quartiers de viande, ainsi que la tête, et la graisse; puis le reste, intestins et pattes, préalablement lavés. P associe plus précisément l'effet attendu de l'holocauste à l'imposition de la main et à la mise à mort, d'une part - par ces deux rites l'offrant est agréé et absous-, à la combustion sur l'autel, d'autre part - le sacrifice devient par là offrande de parfum agréable pour Yhwh. En renonçant intégralement à un animal au profit de Dieu, I'offrant se rend agréable à Dieu et est accepté par lui. En conséquence, à la suite de ce préalable, cette offrande devient pour Dieu une offrande au parfum agréable.
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© Alfred Marx, SBEV / Éd du Cerf, Cahier Évangile n° 111 (Mars 2000), « Les sacrifices de l’Ancien Testament », p. 17-18.