La Bible toute entière est traversée par la réalité de la justice mise en œuvre par l'homme et par Dieu : justice humaine justice divine...
La notion de justice est assurément une idée-force de l'existence humaine. Toute une anthropologie ou une organisation de la société humaine en dépend. A l'expérience de la justice, les hommes lient étroitement leur notion de Dieu; au point que l'expérience de l'énormité des injustices conduit bien des hommes à nier Dieu. Mais, inversement, Dieu peut être souvent réduit aux conceptions tout humaines de la justice.
La Bible toute entière est traversée par la réalité de la justice mise en œuvre par l'homme et par Dieu : justice humaine justice divine. La Bible apporte la révélation de la justice comme l'une des marques fondamentales de la relation entre Dieu et l'homme. Et cependant, le livre ne contient aucun traité spécifique sur ce thème, ni n'en propose une définition à la fois précise et plénière. La justice est évoquée à partir de tout ce qui constitue la réalité humaine. Car le peuple d'Israël, comme toute société, s'est donné une législation, un droit, des institutions judiciaires. Il semble même que le goût du procès y ait été très prononcé.
Mais la justice ne peut être réduite aux seules dimensions humaines. Israël n'est pas un peuple qui mène son existence seul. Le Seigneur, son Dieu, est totalement engagé avec lui, auprès de lui, dans une alliance pour la vie. La justice d’Israël est ainsi rejointe par la justice de Dieu dans le réalisme de son histoire. Si bien que cette rencontre est une véritable confrontation. Car pour le peuple d’Israël, comme pour tout le monde, l'expérience de la justice s'éprouve face à l'injustice. Ce fut la servitude en Égypte. Ce fut la déportation en Assyrie puis en Babylonie. Ce fut surtout l'exploitation et l'exclusion des indigents sous les rois d'Israël et de Juda, et dans tous les siècles suivants.
Ce qui fait l'apport particulier de la Bible vient de Dieu lui-même. Il est le premier à ne pas tolérer l'injustice pour son peuple, qu'elle provienne de l'extérieur, de ses ennemis, ou qu'elle s'exerce à l'intérieur même de la société israélite. Le sens de la justice du Seigneur se communique ainsi à Israël, qui n'a plus à imaginer la justice de Dieu selon ses modèles humains ou ses pratiques judiciaires. A lui d'être juste dans toutes ses relations comme son Dieu est juste envers lui.
Qu'elle soit de Dieu ou d'Israël, la justice n'est plus simplement un système judiciaire qui gère et règle les conflits. La réalité de l'alliance impose son propre code de justice à chacun des partenaires. La justice devient alors la modalité première de leur relation.
© Gérard Verkindère, SBEV / Éd du Cerf, Cahier Évangile n° 105 (Septembre 1998), « La justice dans l’Ancien Testament », p. 5.