L'intérêt de la comparaison synoptique se situe à plusieurs niveaux...

De nombreuses méthodes nouvelles ont fait leur apparition en exégèse depuis une trentaine d'années, telles que lecture sémiotique, analyse rhétorique, analyse narrative, approches par les sciences humaines, par les effets du texte… (1). Il est bon d'en connaître et d'en pratiquer quelques-unes car chacune permet un regard neuf sur les textes. Ces nouvelles méthodes rendent-elles caduques la comparaison synoptique ? Les cinq exercices de lecture pratiqués dans ce Cahier, construits selon des schémas différents, montrent que celle-ci garde toute sa fécondité. Il ne s'agit d'ailleurs pas ici de penser en termes d'opposition mais de complémentarité. Aussi bien la comparaison synoptique est-elle capable d'intégrer de nouvelles approches, telle la lecture socio-religieuse.

L'intérêt de la comparaison synoptique se situe à plusieurs niveaux. Elle permet de poser ou de mettre en évidence ce que l'on appelle classiquement « le problème synoptique ». On a brièvement expliqué en quoi consistait la théorie des deux sources. Reçue par une majorité d'exégètes, elle fonctionne comme un instrument commode de première approximation. On aurait toutefois tort de l'absolutiser, car elle montre assez vite ses insuffisances. Nous avons pu le vérifier en comparant les trois péricopes de la guérison de la belle-mère de Simon-Pierre. Aussi bien chaque théorie synoptique devrait-elle fonctionner comme un outil plutôt que comme un cadre rigide, susceptible de rendre compte de toutes les particularités.

Comparer des textes parallèles présente aussi l'intérêt de relever ce qui vient de la tradition, c'est-à-dire des matériaux littéraires utilisés par les évangélistes, et ce qui vient de la rédaction, c'est-à-dire soit ce qui est le travail propre du dernier rédacteur, soit ce que celui-ci a remanié de la tradition. À partir par exemple de la comparaison synoptique des péricopes parallèles de la Brebis égarée ou perdue, il n'est pas très difficile de désigner, dans une tentative de reconstruction, la source à laquelle ont puisé Matthieu et Luc.

La comparaison synoptique a surtout un intérêt proprement théologique. Elle permet de dégager les accents propres à chacun des évangiles et c'est surtout dans ce but qu'a été réalisé ce Cahier. Il veut mettre à la portée de tous une lecture intelligente et croyante des évangiles. Il suffit que chacun s'arme de bons instruments de travail de courage et de bonne volonté quitte à se faire aider. Si les aspects techniques relèvent de la spécialité de l'exégète, l'approche des évangiles n'est pas réservée à une élite. Elle est l'affaire de tous ceux qui veulent entrer dans une intelligence de la foi.

© Jean-François Baudoz, SBEV / Éd du Cerf, Cahier Évangile n° 103 (Mars 1998), « Lire les évangiles et synopse. Cinq exercices de lecture », p. 70.

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(1)  Cf. Commission Biblique Pontificale, L'interprétation de la Bible dans l'Église, Paris, Cerf, 1994.