Les règnes de deux souverains asmonéens : Alexandre Jannée et Salomé Alexandra...

Alexandre Jannée (103–76)
Alexandre Jonathan (en grec : Jannée) régna vingt-sept ans. Au début de son règne, il cherche en vain une ouverture vers la mer. Cléopâtre III, mère du roi d’Égypte Ptolémée IX qu’elle a pris en détestation, conclut un traité de paix avec les Juifs à Scythopolis. Peu à peu, Alexandre Jannée gagne le littoral, depuis le Carmel jusqu’au torrent d’Égypte, sauf le territoire d’Ascalon.

À l’ouest, il s’étend en Transjordanie. À propos de Pella, AJ XIII, 397 note ceci : " Cette ville, ils la démolirent parce que ses habitants n’acceptaient pas de passer aux coutumes ancestrales des Juifs. "

En imposant la politeia juive aux cités païennes, les Asmonéens imitent les rois hellénistiques qui apportaient la politeia grecque aux cités orientales. Comme eux, Jannée frappe des monnaies (dont certaines bilingues grec/hébreu) avec cette inscription : " Alexandre le grand prêtre et la communauté [Sénat ?] des Juifs ".

Mais le peuple ne supporte pas ce régime. En 96 av. J.-C., peut-être à l’instigation des pharisiens, lors de la fête des Tentes où il officie, la foule bombarde Jannée de cédrats, l’accusant d’être un pontife illégitime. En représailles, 6000 Juifs sont massacrés (AJ XIII, 376). Éclate alors la guerre civile. Les pharisiens font même appel à Démétrios III de Syrie qui, avec une armée juive, défait les mercenaires de Jannée à Sichem, vers 88. Les pharisiens font ensuite machine arrière ; mais ce sera un régime de terreur auquel Qoumrân fait écho. Josèphe parle de 800 crucifixions.

À sa mort, après une longue maladie due à son alcoolisme et autres excès, Jannée enjoint à sa femme, Salomé Alexandra, de gouverner avec les pharisiens. Il laisse le royaume asmonéen dans sa plus grande étendue.

Salomé Alexandra (76–67)
C’est un temps de paix. La reine nomme grand prêtre Hyrcan II, son fils aîné, un ami des pharisiens qui sont tout-puissants et qui ont sans doute la majorité au Sanhédrin (AJ XIII, 409). Peut-être est-ce à cause d'elle que les pharisiens eurent une position féministe.

Très pieuse, elle " permit aux pharisiens d'agir à leur idée en tous domaines et elle ordonna aussi au peuple de leur obéir. Et elle restaura quoi que ce soit des lois que les pharisiens avaient introduites en accord avec la tradition des pères et que son beau-père Hyrcan avait abolies. Ainsi, tandis qu'elle avait le titre de souveraine, les pharisiens avaient le pouvoir " (AJ XIII, 408 s.). De Siméon ben Shetah, maître pharisien, les légendes rabbiniques feront même un frère d’Alexandra. En outre, par sa prudence et sa fermeté en politique étrangère, n’était-elle pas une nouvelle Judith ?

Mais l’aristocratie se révolte lorsque les pharisiens veulent châtier les ex-conseillers de Jannée. Aristobule II, le fils cadet de Jannée et d’Alexandra, s’allie aux sadducéens pour calmer les ardeurs pharisiennes. Plus grave, il s’empare de forteresses à partir lesquelles il se prépare à supplanter Hyrcan II.

Morte à soixante-treize ans, Alexandra laisse, dans le Midrash, le souvenir d’un période de prospérité : " Aux jours de Siméon ben Shetah et de la reine Salomé, la pluie tombait les nuits de sabbat, si bien que le blé atteignait la taille de rognons, l’orge, celle des olives, les lentilles, celle de deniers d’or " (Midrash Lévitique Rabba, XXXV, 10).

© Claude Tassin, SBEV / Éd. du Cerf, Cahier Évangile n° 136 (juin 2006) "Histoire d'Israël : des Maccabées à Hérode le Grand",  p. 32-34.